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Si c’est pas la perfection...

mardi 9 octobre 2012, par Stéphane


On attend toujours patiemment le prochain livre de Jean Echenoz, et c’est avec délectation que l’on s’y plonge.

Qui a dit qu’il ne fallait pas abuser des bonnes choses ? Je trouve cette phrase ridicule.

Que du bonheur, cette incroyable fluidité, ce rythme quasi absolu. De l’art de raconter, sans anicroche, en 120 pages.

« Ne fût-ce qu’à cause de ces deux-là, le pou, le rat, obstinés et précis, organisés, habités d’un seul but comme des monosyllabes, l’un et l’autre n’ayant d’autre objectif que ronger votre chair ou pomper votre sang, de vous exterminer chacun à sa manière - sans parler de l’ennemi d’en face, différemment guidé par le même but - il y avait souvent de quoi vous donner envie de foutre le camp. »

On pense inévitablement au remarquable Paths of glory (Les sentiers de la gloire) de Kubrick, à ces ignobles tranchées (tu parles d’une gloire !).

Ici, donc, tout est dit. C’est lumineux.

Vous qui l’avez lu, déliez vos langues, racontez !

Minuit. 12€50.

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1 Message

  • Si c’est pas la perfection...

    9 octobre 2012 22:02, par Brigitte
    Comme nous avons lu de concert, 14, Stéphane et moi, je vais compléter son propos aussi lapidaire qu’une phrase de JE. Vous comprendrez que le gaillard (JE) fait tenir l’horreur de la grande guerre en 120 pages et se paie le luxe de nous faire rire : eh oui, j’ai ri souvent, du malheur des autres c’est vrai. Je ne sais pas si vous vous souvenez de la Une de Charlie Hebdo qui a failli mettre le feu aux poudres il y a quelques semaines avec ce titre "faut pas se moquer" (à propos d’un Mahomet paralytique genre "Intouchables"), et bien le livre de JE a produit sur moi le même effet : "faut pas se moquer" mais quand même...lisez plutôt : "Anthime n’a presque pas osé se plaindre ni crier de douleur, ni regretter son bras dont il n’avait d’ailleurs pas bien conscience de la disparition. Pas bien conscience en vérité non plus de cette douleur ni de l’état du monde en général, pas plus qu’il n’a envisagé, voyant les autres sans les voir, de ne jamais pouvoir s’accouder lui même que d’un côté, dorénavant" Autre déconvenue d’être manchot et à laquelle on ne pense pas assez, jouer aux cartes : "...comme on lui proposait toujours de l’aider, comme on en profitait toujours pour regarder son jeu, il a fini par en avoir marre..."c’est le genre de détails qui me fait rire, et ce livre est bourré d’observations désopilantes de cet acabit, d’autres sont plus pragmatiques "il n’était pas rare qu’il se rendormît après s’être éventuellement masturbé, - ce qui, de la main gauche a été un problème vite résolu", d’autres hyperréalistes résument l’effroi de la guerre avec ce genre d’images : " les sapeurs transpirent de fatigue et de peur, ôtent leur capote pour travailler plus aisément, la suspendent à un bras qui, saillant du sol retourné, leur tient lieu de portemanteau". Vous comprendrez qu’on ait envie de parler de ce livre après l’avoir refermé, ne serait-ce que pour alléger la douleur que l’on prend en pleine poire à chaque phrase, travaillée et retravaillée jusqu’à l’épure absolue. Du Echenoz grand cru !

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