mardi 9 mars 2010, par Stéphane
Les Inrocks : « Vous vous êtes inspiré de l’affaire Stern pour écrire ce livre : pourquoi avoir choisi d’en faire un roman plutôt qu’un récit ? »
Régis Jauffret : « Quand on écrit le mot roman sur un livre, ça revient à dire "mensonge" : c’est une falsification de la réalité. L’imaginaire n’est rien d’autre que ça car on n’a pas accès à une autre imagerie que le réel. » Voilà.
Difficile de résister à l’écriture de Régis Jauffret ; une fois le livre entre les mains, plus moyen de le lâcher. Ce bonhomme est habité par une imagination débordante contre laquelle il ne peut lutter, une imagination incroyablement fertile. Il possède un sens absolu du rythme, donne une (fausse) impression de facilité. Et puis, son écriture est incroyablement fluide.
Préambule. « Personne n’est jamais mort dans un roman. Car personne n’existe dedans. Les personnages sont des poupées remplies de mots, d’espaces, de virgules, à la peau de syntaxe. La mort les traverse de part en part, comme de l’air. Ils sont imaginaires, ils n’ont jamais existé. » Quant à la quatrième de couverture, une "microfiction" à elle seule.
Dans « Sévère », on suit la narratrice tout au long de sa -courte- fuite en avant, durant laquelle elle évoque sa relation pour le moins tumultueuse et quelque peu triviale, entretenue avec cet homme qui désormais n’est plus.
Échantillons. « Je ne croyais pas davantage en Dieu qu’au Loto. » « Je me suis accrochée à la rampe de la passerelle en descendant de l’avion. J’ai titubé sur le tarmac jusqu’au car. J’étais saoule, je me sentais floue. L’extérieur était sans contours. À l’intérieur, je m’effondrais sans me voir. »
À Manosque, en 2008, nous avions tous été médusés par le personnage. N’en doutons pas, avec lui, nous ne sommes pas au bout de nos surprises.
Seuil. 17€.